Chaïm Soutine
Né en Biélorussie en 1893, Chaïm Soutine est de ceux qui viennent au monde, doués pour le désespoir et la démesure. Il est de ceux également qui savent utiliser ce côté obscur de leur caractère à des fins artistiques, ce qui ne les empêche nullement de se perdre un peu mais qui arrive quand même à donner un fil conducteur à leur vie. Ils ont en eux un potentiel créatif étonnant. Son père tailleur semble accepter assez facilement le côté fantaisiste de son fils plus doué pour le dessin que la couture. Il suit l'école des Beaux Arts à Vilna. Et à 18 ans,
il est à Paris, où fauvisme, cubisme commencent à attirer une certaine clientèle soucieuse de se constituer une collection.
Une foison de jeunes artistes venus de tous les pays s'installe dans des lieux protégés, comme le Bateau-Lavoir, ou la Ruche, et des noms devenus prestigieux sont les compagnons de Soutine, comme Léger, Chagall, Delaunay, Zadkine, Archipenko ... Au Louvre, Soutine découvre Courbet, Ingres, Rembrandt. L'influence de VanGogh est évidente, mais curieusement ordonné et régulier chez Van Gogh, le trait de peinture est plus saccagé chez Soutine, plus tourbillonnant, à la manière d'un typhon qui emmène tout sur son passage.
Il y a tempête dans ses toiles, il y a gros vent, il y a chamboulement. Le rouge y est plus sanguinolent qu'ailleurs. Quant à ses visages, c'est juste après que le rouleau compresseur ne soit passé dessus, alors forcément ces visages là ont mal, et font mal aussi. La caricature n'est pas loin. En 1915, Soutine rencontre Modigliani, ils partagent 2 passions, la peinture et la boisson. Leur amitié sera à leur image, parfois miséreuse, parfois houleuse. Ils entretiendront ainsi l'un sa tuberculose, l'autre son ulcère. Les amours de Soutine feront moins de bruit que cette amitié. Un modèle Paulette Jourdain, une Déborah Melnik qui aurait eu une fille de lui non reconnue, une Gerda Groth et enfin Marie Berthe Aurenche. Voilà pour les connues. Soutine avait sûrement quelque chose d'aimable, à moins que ces femmes ne fussent attirées par son caractère de malheureux frusté permanent, nul n'en sait rien. Soutine finira par devenir célèbre et vivre enfin de sa peinture, mais son âme tourmentée ne trouvera pas la paix.
Le bonheur ne fait pas partie du monde de Chaïm Soutine. Son ulcère se perfore, il en meurt à l'âge de 50 ans.
Exposé en ce moment à la Pinacothèque, n'y est pas tout seul, en bonne compagnie de Modigliani, Utrillo, Valadon, Derain, Ebiche, Hayden, et d'autres que j'ai oubliés. Trop de peintres pour s'attacher à un seul. Dommage, on se disperse un peu trop. Alors, Soutine, il me faudra le revoir à nouveau, seul cette fois ci.