Sonia Delaunay au Musée d'Art moderne
De la couleur, du mouvement, du paraître, un goût certain pour les objets du quotidien, les marquer de son empreinte, décorer couverture, coffrets, abat jour, livres, vêtements et murs, une vitalité à toute épreuve. Il y a un vide chez Sonia une rupture d'enfance qu'elle comblera par de la couleur, par une hyperactivité artistique et sociale.
Elle ne mentira jamais, elle éludera toujours, elle dissimulera ce qui l'ennuie. C'est une force de vie qui l'aidera tout au long de sa vie : éluder ce qui fâche et sourire toujours. Née en Russie en 1885 dans une modeste famille, Sarah Stern devient à l'âge de 5 ans Sofia ou Sonia Terk, du nom de son oncle maternel avocat à St Pétersbourg qui l'éduquera. Elle ne reverra jamais ses parents. Elle bénéficiera ainsi d'une éducation bourgeoise. Son oncle Henri Terk est un érudit féru d'art. Sonia dira de rares fois qu'elle n'aimait pas sa mère, ni sa tante non plus. Elle comblera ce manque d'amour donné, ce manque d'amour reçu, en se concentrant sur son devenir : émerger du lot et briller. Sonia entre dans l'atelier de Schmidt-Reutter, en Allemagne en 1903 et y apprend les bases.
En 1905, Paris où elle s'inscrit à l'Académie de la Palette, elle sera adoptée par la colonie russe. Elle se passionne pour les fauves,
Cezanne, la gravure et se lie à Wilhelm Uhde collectionneur et marchand d'art. Elle commence à broder en 1908
elle épouse Uhde en décembre, un arrangement confortable, elle y gagne le droit de rester à Paris et de connaitre ainsi tous les peintres qui percent : Braque, Derain, Dufy, Vlamink, Picasso, Robert Delaunay. Elle appréciait l'amour de l'art d'Uhde, elle découvre l'amour avec le peintre Robert Delaunay exalté, imprévisible, talentueux, fou de couleurs comme elle. Il y a chez Sonia une soif d'absolu, une exigence extrême où l'art est omnipotent. Robert Delaunay incarne cette particularité dont a besoin Sonia pour pouvoir aimer; il la stimule, comble son besoin d'énergie.
Qui est le maître dans ce couple ? Difficile à dire. Elle, est l'organisatrice, la gérante, la garantie de leur union. La peinture est leur façon de s'aimer jusqu'à la jouissance, lui se laisse guider par son besoin de peindre, elle, assure le tout. En 1910 elle l'épouse. En 1911 naissance d'un fils. Elle commence ses premiers abat-jour simultanés appliquant la théorie de Chevreuil sur le contraste simultané (contraste constitué par des couleurs perçues simultanément).Elle réalise ses premiers collages, des reliures en papiers appliqués et en déchets de tissu, elle fait des coussins, des gilets. 'La couleur l'excite' dit elle. Séductrice, Sonia Delaunay s'entourera toujours d'hommes talentueux et fragiles, Apollinaire, Blaise Cendrars, André Breton Louis Aragon, Philippe Soupault, Tristan Tzara, René Crevel, Joseph Delteil, Vladimir Maïakovski. Ces poètes seront un temps ses amis, mettront son art du costume en poèmes, beaucoup auront une destinée tragique, mais un temps ils auront traversé le ciel de Sonia, l'illuminant d'étoiles ... simultanées. Sonia aime s'amuser, le bal
Bullier est aussi un prétexte pour exposer ses robes qui bougent au rythme du tango ... simultanées bien sûr.
1914 Robert réformé, ils partent en Espagne, puis au Portugal où les marchés de pastèques, melons, les costumes, la musique inspirent Sonia.Les mouvements des corps et des couleurs se contrarient et donnent un rythme.
Cette guerre amènera pour Sonia la fin de sa rente provenant de biens immobiliers de Russie, en 1917 les bolcheviks nationalisent, Sonia est ruinée. Mais la rencontre avec Serge Diaghilev la sauve en lui proposant de créer les décors et costumes d'un ballet Cléopâtre.Sonia décide alors d'arrêter de peindre pour gagner sa vie. Décor de théâtre, ouverture d'une casa Sonia en Espagne où elle vend ses objets, robes, chapeaux, meubles, tissus.
La vente d'un tableau les aide à se ré-installer à Paris vers 1921. Sonia s'attèle aux costumes d'une pièce 'Coeur à gaz', d'une fête de charité. Sonia Delaunay crée sans arrêt tissus, robes et manteaux.
L'exposition internationale des Arts décoratifs de 1925 la consacre avec sa boutique simultanée.
Elle créera même l'habillage d'une voiture. Financièrement cela dérape un peu, Sonia continue cependant ses travaux alimentaires. Lors de l'exposition Internationale de 1937 les Delaunay décorent 2 pavillons dont le Pavillon de l'Air.Elle expose au salon des Tuileries, au salon des Réalités nouvelles des Rythmes qui rappellent un peu certaines toiles de Robert Delaunay . Et puis c'est la guerre et l'exode.
La mort de Robert en 1941 la laisse désemparée. Elle se consacre à l'exposition rétrospective de son mari en 1946 et à son oeuvre. Elle renaîtra en 1953 à la peinture, la sienne. En 1960 elle peint un jeu de cartes esquissé lors de sa jeunesse.
En 1966, elle rencontre son dernier poète Jacques Damase, elle réalisera autour de ses poèmes 11 pochoirs. Elle recrée des tapis, des lithographies, des décors, des costumes, des toiles
Sources : Sonia Delaunay de Dominique Desanti
Sonia Delaunay rythmes et couleurs