Martial Raysse
De lui, on connaît le portrait de son épouse, fort belle d'ailleurs et sa Grande Odalisque verte et borgne
si kitsch; en recherchant un peu on connaît aussi ces mises en scène très artificielles :
les belles années 60-70, deux décades prodigieuses d'une jeunesse prometteuse qui se perdra dans le superficiel, les années pop ... Il y a du Pop'Art chez Martial Raysse, mais il fait partie de la bande à Yves Klein, celle du nouveau réalisme qui fait de l'art un manifeste sociologique, protestataire, contestataire. Il fait partie aussi de ceux qui ont un humour tendre, mêlant le classique des grands maîtres comme Ingres, Cranach l'Ancien, Tintoret, à l'hétérogéneité des peintres modernes connus et inconnus.
Ce peintre en vogue dans les galeries d'art, rompra pourtant avec le monde de l'art officiel et suivra sa propre route, en continuant à mélanger les genres, en se révélant un grand dessinateur, un coloriste talentueux, un peintre au final assez surprenant.
La mouche évoque bien sûr les mouches des belles Dames du XVIII utilisées pour faire ressortir leur teint de neige, ici elle rappelle que nous sommes périssables, un petit clin d'oeil au monde moderne qui impose une apparence de jeunesse et de beauté éternelles. Martial Raysse aime reproduire les visages féminins : portraits quasi académiques, mais d'un vert si vert qu'il ferait vomir les anti-Renoir qui qualifiaient alors les carnations du vieux Maître cadavériques, d'un goût douteux et déplorable; portraits plus modernes, malicieux, pleins de vitalité, racontant une petite histoire, mais toujours beaux; il les maquille de néon, petit symbole clinquant de la vie moderne.
La laideur existe chez lui, mais re-visitée, carnavalesque, hors du temps, fantastique, belle au final. C'est un peintre du beau, presque tout le temps, il joue jusqu'en 70 avec le chic et le choc, est dans l'air du temps, est très à la mode.
Après les années 70, Martial Raysse se détache des galeries d'art et réalise des images au pastel et à la détrempe sur papier, assez proches de la bande dessinée, et précurseurs des grandes fresques qu'il aimera produire vers 90. Puis, Martial Raysse retourne à l'antique et nous livre quelques tableaux aux tons bronze et vert assez surprenants dans leur réalisation, atypiques en somme.
entremêlés toutefois de tableaux variés qui n'ont plus rien à voir avec rien, mais qui témoignent d'un autre savoir faire.
Un Bacchus contemporain joue avec une Diane-Barbie sculptée très dévergondée.
Dans les années 90, Martial Raysse retourne encore au classique qu'il n'abandonne au fond jamais, au traditionnel, au paysage
puis il nous étonne à nouveau avec ses fresques où l'on retrouve des femmes sexy, des animaux mythiques, des personnages de théâtre grimaçants
et parallèlement il produit des petits visages de femmes mutins, petites histoires drôlatiques
et poursuit en 2000 les peintures murales aux couleurs vives, aux personnages burlesques, sexy ...
Riche, divertissante, colorée, époustouflante, cette exposition. Martial Raysse né en 1936 n'a pas fini d'étonner, et cet article n'est qu'une facette de son talent. Très diversifié ce peintre, sculpteur; les fils conducteurs de cette oeuvre polymorphe, car il y en a malgré les apparences, sont le rappel continu des maîtres de la peinture, l'humour toujours présent, les couleurs. Allez une petite dernière pour le plaisir ...