On a en général une vision fort réductrice de Van Gogh, ses troubles psychologiques, son oreille coupée lors d'une altercation avec Gauguin, sa relation fidèle à son frère Théo, Anvers sur Oise, Gachet, son suicide. La Pinacothèque choisit elle de réduire son inspiration et établit un parallèle avec l'oeuvre de Hiroshige pas forcément convaincant.
Le japonisant est bien sûr à la mode, et les peintres de l'époque vont plus ou moins japoniser, comme ils ont académisé avec les classiques, les rois de l'académisme comme Thomas, Couture, Gérôme, avant de les rejeter ... et puis ceux qui sont plus talentueux, plus créatifs, plus doués, moins peureux, vont trouver leur style propre, celui qui nous fera reconnaître la patte du peintre.
Le pont supendu est il japonisant ?
Vincent séjourne après sa séparation avec Sien, à Nieuw Amsterdam, dans un pays qui lui ressemble à ce moment là, désolé, couleurs pâles, eau qui domine, lumière faible, Vincent réussit fort bien les aquarelles. Si le Japon doit l'influencer, ce n'est pas dans cette aquarelle là, quant au pont sur le canal, il ressemble à beaucoup de ponts suspendus qui ne manquent pas en hollande. Van Gogh était très érudit, doté d'une famille cultivée aisée qui comptait outre des Vincent en pagaille, de nombreux marchands d'art, ajoutez à cela que la mère de Van Gogh avait un fort joli coup de crayon, et qu'elle initia son fils au dessin. Vincent naquit 1 an après un premier Vincent mort-né, première ombre au tableau. Plusieurs Van Gogh sujets à des dépressions, deuxième ombre au tableau. Le père, pasteur, médiocre dans sa fonction, ce qui ne le sortit pas de son austère et anxieuse tristesse naturelle, troisième ombre au tableau. Un caractère d'insoumis, un physique de roux fort peu apprécié à l'époque, un internat forcé considéré comme une exclusion du milieu familial, voila pour les ombres de Vincent. Ensuite, il y eut la difficulté constante à se faire aimer d'une femme, ensuite il y eut cette obstination à vouloir être pasteur comme son père, il y eut beaucoup d'échecs chez Vincent qui eurent un double effet, l'un négatif à s'isoler du monde, à ruminer, à "criser à la folie", mais l'autre positif, à extérioriser son amour de la nature, son amour des humbles dans la peinture (comme dans la vie d'ailleurs) puis à vivre au final le bonheur par sa peinture. Il fréquentera toute sa vie les peintres et les livres. Alors, tout l'a inspiré Vincent, les peintres hollandais, les français, les japonais, en vrac Israels, les 3 frères Maris, Mauve, les 3 Cuyp, Rembrandt, Millet, Corot, Hiroshige, Hokusai, Monticelli, Rubens,
Anquetin, Seurat, Signac etc etc .... En 1887 Van Gogh rencontre Gauguin, en 1888 Vincent est en Arles, il y recherche la lumière, sans doute la lumière et les couleurs gaies, c'est un peu le Japon des fresques japonaises question atmosphère, lieu de plaisir pour la caserne de zouaves, le pont de Trinquetaille autre pont suspendu, les arbres fleuris. Van Gogh se met à peindre des tableaux de vergers en fleurs, car il a besoin d'argent, Van Gogh, et à juste titre puisque le Japon est à la mode, et bien il fait des arbres à coups de brosse, hachés, discontinus, son trait à lui.
Des japonais, il retiendra le trait fin, précis, qu'il fera lui, Van Gogh, haché, virevoltant, en mouvement perpétuel, tourmenté; des impressionnistes il apprit la couleur; de Monticelli, il retiendra le contraste des explosions de couleurs en pâte, il n'était pas bégueule Van Gogh, il prit tout ce qu'il pouvait prendre des peintres qu'il rencontra, il s'en imprégna, et aboutit à sa peinture si reconnaissable, si particulière.
Un petit dernier, Le Bon Samaritain, copie de Delacroix est il plus japonisant que van goghien copie Delacroix ?
Des paysages de Van Gogh dont les couleurs éblouissent, la lumière de Van Gogh ... l'exposition modeste de la Pinacothèque vaut le déplacement rien que pour cela. Elle nous vaut aussi une rencontre japonaise, alors on ne boude pas son plaisir, on en pense ce que l'on veut, mais on y va.